« RAUS, RAUS ODER DU BIST TOT !!! (Dehors, dehors ou vous êtes morts)« hurla le monstre que les humains avaient importé de Germanie sans son consentement voila quelques décennies. Il déboula vers Mirza et le troupeau en encensant de la tête, la bave aux babines retroussées sur des canines énormes.
Le troupeau pris de panique se rua n’importe où sans même prendre la formation d’urgence, se culbutant, roulant et sautant mouton les uns par dessus les autres. Mirza en aurait fait autant mais les petits se bousculaient dans son ventre malgré ses recommandations de se tenir sage, car ce n’était surtout pas le moments de sortir.
Elle s’avança en rampant et en gémissant en signe de soumission. Déconcerté, le gros poilu ralentit sa charge jusqu’à trotter, humant l’air en grognant. Dès qu’ils ne furent près l’un de l’autre que de quelques mètres, Mirza se coucha sur le dos, offrant la totale subordination de son ventre gonflé mis à merci. Le grand ours brun s’avança sur ses gardes jusqu’à la renifler. Servile, Mirza en gémissant lui lécha la face.
L’ours : Hargnch ! Humf ! Pourquoi me déranges-tu dans mon endormissement ? Que venez-vous donc f… dans mon domaine ?
Grogna le gros nounours en langage animal universel. Mirza comprit que le danger s’amenuisait et que le costaud n’était pas méchant, juste malcommode à son réveil. Elle se coucha sur le côté pour lui parler plus facilement.
Mirza : mon nom est Mirza, je suis grosse et rendue à mon terme. Je n’ai plus le temps de chercher une autre caverne. Je vous en prie Monsieur l’ours. Je suis votre humble servante à votre service et…
L’ours : Où est ton maître ? Je ne veux pas d’humain maudits sur mon territoire. (se remettant en colère) Où il est ? Je vais le tuer. Je vais tous vous tuer. Hargnch ! Hargnch ! ROARRRR !
Et il se redressa de toute sa taille au dessus de Mirza, la gueule ouverte et l’oeil féroce.
Mirza (de nouveau se roulant sur le dos en glapissant) : Kaï ! Kaï ! Je n’ai plus de maître, nous n’avons plus de maître, je vous le jure ! Kaï Kaï. Nous sommes un troupeau LIBRE ! Il n’y a pas d’humain avec nous.
L’ours : Humf ! Impossible. Tu es une chienne de berger et là bas il y a un troupeau de bêlant. Pas de troupeau sans humain. On ne me la fait pas à moi. Tu me mens et J’ai horreur qu’on me mente. RoaRRR !!!
Mirza (couinant de peur) : kaï ! Kaï ! Kaï ! Vénérable ours, vous qui avez le flair le plus puissant du monde, sentez-vous la présence d’un humain autour de vous ?
Le mastard s’éloigna de quelques pas et lentement tourna 3 fois sur lui-même en humant aux 4 vents.
L’ours (branlant de la tête, déconcerté) : Non, c’est vrai. Je ne sens pas la puanteur maléfique humaine. Mais ils ont plus d’un tour dans leur sac. Où se cache-t-il ? Dis le moi tout de suite ou je te tue toi et tes petits. Hargnch ! Rrrrrr !
Alors Mirza lui raconta tout, Blanquette, leur fuite, leurs recherches, leur arrivée ici et l’urgence pour elle de mettre bas. L’ours s’assit puis se coucha museau à museau pour la flairer pendant qu’elle parlait car le menteur émet une odeur qui le trahit toujours. Et ainsi il sut qu’elle disait vrai. Il médita pendant qu’elle finissait son récit.
L’ours (se relevant) : J’aimerai bien t’aider, mais je ne peux pas. Il te faudra au moins 1 mois avant que tes petits puissent te suivre et moi je serai en pleine hibernation. Et pendant mon hibernation, je ne peux tolérer personne autour de moi dans ma vallée. C’est trop dangereux. Ces lâches d’humains ont profité de mon sommeil pour me kidnapper et m’exiler ici. Humf ! J’aimerai bien, mais je ne peux pas. Allez, partez ailleurs tant qu’il en est encore temps. Comme tu es brave, je ne vous ferai pas de mal.
Mirza : Attendez, attendez ! Si les humains viennent pendant votre sommeil qui vous avertira ?
L’ours (oreilles dressées) : Humf ?
Mirza : Nous détestons autant que vous les humains, ils ont noyé ma portée précédente et ils massacrent les agneaux. Nous pourrons les sentir venir pendant que vous dormez et on vous réveillera à temps pour nous enfuir ou les massacrer. Vous vous rendez compte ? Pour la première fois depuis que vous avez quitté votre mère, votre sommeil pourra vous dormir en toute quiétude.
Le gros poilu réfléchit en hochant la tête, les yeux s’alourdissant. Il pencha son énorme tête au dessus de Mirza qui se mit aussitôt sur le dos, les quatre pattes en l’air. Il la huma sous toutes ses faces et surtout sa carte de visite génétique sous la queue.
L’ours : Je sens que tu es une bonne fille honnête. OK. Voici mes conditions. Pour aucune autre raison que l’urgence, personne ne devra me déranger dans ma chambre. Vous vous tiendrez à l’entrée car je ne veux pas de crottin dans MA caverne. Car ça restera MA caverne. Compris ?
Mirza : Compris !
L’ours : as-tu besoin de l’acceptation du troupeau ?
Mirza : Je suis d’office plénipotentiaire car ils n’ont pas d’autre choix.
L’ours (levant la patte) : Pacte conclu Madame la plénipotentiaire ?
Mirza (se levant et lui donnant à son tour la patte) : Pacte conclu Monsieur l’ours.
Pendant que Mirza partait regrouper le troupeau pour tout leur expliquer, le colosse s’éloigna vers la grotte. Tout d’un coup il s’arrêta et se retourna en lançant un puissant humf ! Aussitôt Mirza tremblante se figea et lui fit face, nez à terre.
L’ours : Dans mon lieu de naissance, les humains nous nomment Tragen. C’est pourquoi ceux qui m’ont enlevé ont marqué au pinceau ma prison de transport avec un gros T . Dans le pays de transit ils ont ajouté un tiret puis BEAR. C’est pour ça que les humains de mon exil m’ont appelé T-BEAR avant de me libérer dans ces montagnes. Alors, toi et les moutons, appelaient-moi T-Bear.
Mirza : Mes respects, monsieur T-Bear.
Chacun repartit de son côté, mais après quelques pas, T-Bear lança en se retournant un nouvel Umf ! qui arrêta à nouveau Mirza.
T-Bear : Les humains m’avaient donné 2 femelles pour que nous croissions et que nous multiplions. L’une s’appelait Poartä, ours en roumain et l’autre Mistiè, ours en russe. Les ours ne sont pas racistes. On a fait des petits. Mais les humains sont incohérents en plus d’être cruels et méchants. Ils les ont tous tués, les petits et leurs mères pendant leur sommeil. Je suis le dernier et ils me cherchent. Tu comprends maintenant pourquoi je ne peux pas sentir les humains.
Mirza (horrifiée) : Et pourquoi les ont-ils tués alors que c’est eux qui vous ont déracinés pour vous lâcher dans la montagne ?
T-Bear : Parce que, soit-disant, on mangeait leurs moutons.
Mirza (consternée) : et c’est vrai ?
T-Bear : c’est très exagéré. Nous, les ours sommes par principe végétariens… sauf avant d’hiberner où il nous faut du poisson et à la sortie de l’hibernation où il nous faut à tout prix de la bonne viande rouge pour nous refaire. Alors, s’il y a un mouton ou un veau qui passe, il y passe… mais pas de chien tu peux te rassurer… ni d’humains. Vous goûtez trop mauvais.
Mirza : merci pour ce détail gastronomique rassurant. Mais je n’ai pas le droit de mettre en danger le troupeau dont j’ai la garde et qui me fait confiance.
T-Bear : Ne t’en fais pas. Juste un mouton faiblard ou trop vieux prêt à crever par an me suffit. C’est pas cher de loyer par rapport au carnage que leur faisaient subir les humains.
Mirza (suspicieuse) : Alors pourquoi les humains ont décimé ta famille si vous ne mangiez qu’un seul mouton par personne ?
T-Bear : Ce sont les bergers eux-même qui écorchaient leurs vieux moutons pour nous en rendre responsables et justifier la tuerie des nôtres.
Mirza : Oui, je sais, ils font la même choses pour les loups, mais c’est pour toucher de l’argent de leurs gouvernement pour chaque carcasse. Je les ai entendus parler entre eux. Les humains ne peuvent pas croire dans leur orgueil incommensurable que nous, les chiens, nous puissions comprendre leur langage. Et alors ? Comment sinon obéirait-on à leurs ordres ?
T-Bear : Faut pas chercher à comprendre avec les humains, leurs décisions sont impénétrables. La preuve, c’est qu’ils se tuent les uns les autres sans raison et ils martyrisent leurs femelles. Sur ce je m’en vais me coucher. Bonne nuit d’hiver et au printemps prochain.
Et cette fois il trotta sans s’arrêter pour se pelotonner au plus profond de la caverne. Quelques heures plus tard, T-Bear ronflant et le troupeau bien à l’abri, Mirza donna naissance à 9 chiots mâles et femelles. Plusieurs années passèrent dans la combe où chiens et moutons crurent et multiplièrent dans la paix et la bonne humeur. Il arrivait même que le gros T-Bear joua avec les chiots dont le jeu préféré restait cependant incontestablement le saute-mouton. Grâce à l’appétit carnivore de la meute la garenne se stabilisa et tout le monde vécut heureux et libre dans ce paradis terrestre jusqu’au jour où…
Suite la prochaine fois.
N’oubliez pas de jeter un clin d’oeil aux insolences d’un T-Bear libre au pays de la poutine en cliquant sur le logo ci-contre ![Print]()
aujourd’hui : Fa frette en tabarouette !!!
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